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4 Septembre 2017
À défaut de trouver un métier moins risqué pour leur santé, la plupart des jeunes de Madingou, au sud du Congo Brazzaville, deviennent distillateurs de whisky. En bout de chaîne, les consommateurs se détruisent, eux aussi, à petit feu.
Florence, 30 ans environ, prend un tuyau et transvase d'un fût à une bouteille un liquide très chaud. L’opération est délicate. "On ouvre ensuite le couvercle du fût. Une vapeur bizarre s’échappe alors ; elle provoque des maladies pulmonaires. Et, si le couvercle vous tombe dessus, vous êtes gravement brûlé", précise Lionel Mvouala, un distillateur de boganda, à Madingou, dans le département de
Cet alcool local, obtenu par distillation d’un mélange fermenté de farine de manioc et de maïs, doit son nom au premier président centrafricain, Barthélemy Boganda. Dans les années 60, ses premiers distillateurs étaient en effet originaires de ce pays. Ils ont commencé à le fabriquer d’abord au nord du Congo, frontalier de leur pays d’origine, puis à Brazzaville. Certains sont ensuite arrivés à Madingou, où le manioc et le maïs poussent bien. Aujourd’hui, à Brazzaville, on ne distille presque plus, car l'approvisionnement en manioc et en maïs est difficile et coûteux.
Dans
"Mieux vaut mourir que laisser ce travail"
Isidore, un distillateur, entend ainsi gagner de l'argent pour apprendre ensuite un autre métier : "Nous vendons l'alcool aux détaillants en dame-jeanne de
Les ravages sur la santé s’observent aussi chez les consommateurs. Ce breuvage, dont la teneur en alcool dépasse 40°, finit par arriver dans d'autres régions (Pointe-Noire, Sibiti dans le Pool, Brazzaville). Les amateurs de boganda, couramment appelé par les Congolais de Brazzaville et de Kinshasa soupou na tolo (vomi sur la poitrine, en lingala), sont nombreux parmi ceux exercent des métiers physiques. Certains sont conscients des risques qu’ils prennent en l’absorbant, mais n'arrivent plus à s'en passer. "Souvent, j’en prends pour surmonter mes soucis. En réalité, rien ne change…", témoigne Serge.
Cirrhoses, ulcères, comportements sexuels à risques…
Le docteur Anicet Moussahou, médecin à l’hôpital de Makélékélé, à Brazzaville, détaille les conséquences désastreuses pour l’organisme : "Ces whiskies, forts en alcool, provoquent notamment des cirrhoses du foie, des ulcères et favorisent les comportements sexuels à risques. Certains consommateurs deviennent agressifs, d’autres carrément fous."
Début août, la mairie centrale de Brazzaville, le commissariat, le ministère de
Aux yeux de Dieudonné Moussala, président de l’Association congolaise pour la défense des droits des consommateurs, cette fermeture n’est qu’un premier pas : "Avec nos jeunes, ce sont nos mains valides qui sont touchées. Cela a des incidences sur notre production et notre développement économique. Nos responsables doivent occuper notre jeunesse pour la détourner de la fabrique et de la consommation de cet alcool."
Marien Nzikou-Massala